Deux-Sèvres 

                   
       

 

Laiterie Fromagerie

coopérative

de

LE BOURDET

 

       
                   

 

Historique : 1889 - 1963
     
                   
 

Le Bourdet est une petite localité du canton de Mauzé-sur-le Mignon, située au sud du département, aux portes de ce marais, devenu en 1979 le parc naturel du Marais Poitevin.

Le 22 novembre 1889, le minuscule village du Bourdet, situé le long des rives de "la Courance'', va entrer dans l'histoire de l'épopée laitière en créant la première laiterie coopérative des Deux-Sèvres. Ayant à leur tête, M. Jean Moinet, 72 "braves" s'associent dans cette toute nouvelle aventure, comme M. Moullier, et surtout celui qui en fut l'instigateur et la cheville ouvrière pendant 25 ans M. Henri Grizeau, "le père Henri", comme l'appelaient respectueusement tous les sociétaires. C'est aussi la seconde laiterie de l'Association Centrale des Laiteries Coopératives des Charentes et du Poitou, dont elle a toujours fait partie.

La "laiterie de la Courance" est située à 3,5 km de la gare d'Epannes, sur la voie ferrée reliant Niort à La Rochelle.

La construction débute en 1890, cinq pièces principales constituent le bâtiment : la salle des machines, l'atelier de fabrication en moellon enduit, la chambre d'emballage, le bureau du directeur-comptable et le hangar. La laiterie s'équipe aussi d'une machine à vapeur et commence la fabrication du beurre sous la direction de M. Alcide Mangou qui a sous ses ordres un chauffeur et le beurrier M. Victor Lorioux. Un bâtiment annexe est construit pour abriter une porcherie.

L'année 1891 voit l'agrandissement de la beurrerie suite à la production de lait qui augmente d'année en année dans le secteur du Marais. Le ramassage du lait s'effectue chaque matin par les laitiers en charrettes à roues de bois, tirées par les chevaux, ils passent ainsi de ferme en ferme mesurant le lait livré avec un décalitre gradué, puis versent le lait dans des grands bidons de 200 litres pour les conduire vers la laiterie et les livrer sur un quai. Chaque charrette transporte environ de quatre à six bidons en acier étamé.

 
                   
 

1896 : Sept ans après sa création, la laiterie coopérative compte maintenant 550 sociétaires. L'engouement de la réussite présente, a vite balayé le scepticisme du départ de nombreux paysans.

1898 : Le 1er mai, le Bourdet devient la première laiterie à proposer à ses adhérents, le paiement du lait d'après sa richesse. ll en résultera une répartition plus équitable du produit net et la disparition de la fraude. Chaque sociétaire sera payé proportionnellement au beurre produit par son lait. On embauche à cet effet, un contrôleur.

C'est hélas un échec, au bout d'un an, les paysans préférant la quantité de lait fourni, que le paiement à la richesse butyreuse. M. Alcide Thomäs reste cependant à son poste.

 
           
 
22 octobre 1900
 
           
     
                   
 
Le 22 novembre 1905, l'engagement des sociétaires arrivant à expiration, la société se réduit à 132 membres, par suite du départ d'un grand nombre d'adhérents, notamment ceux du village de "Rochénard" qui vont grossir les rangs de la laiterie d'Épannes, coopérative créée en 1899. Le président, M. Moinet et les vice-présidents MM. Eugène Seigneuret et Servant-Picard déplorent cette désertion. Avec cette défection inattendue, le troupeau des laitières n'est plus que de 432 bêtes.
 
                   
 

1909 : D'après les chiffres communiqués par le président de la coopérative, la laiterie de Le Bourdet reçoit 70.000 litres environ de lait mensuellement, c'est à dire 840.000 litres à l'année.

1906 : M. Moinet est réélu à la tête du conseil. Aux vice-présidences, on trouve MM. Seigneuret et Louis David, père. M. Alphonse Dazelle devient le trésorier et M. Henri Grizeau, le secrétaire. Un nouvel employé fait son entrée à la laiterie. C'est M. Alfred Barbottin.
 
1907 : Le 29 Décembre, après dix huit ans de fidélité ét de dévouement à sa laiterie, le président M. Moinet passe la main. M. Henri Grizeau est sollicité par ses collègues du conseil, pour le remplacer.

1909 : Le matériel, utilisé depuis la fondation, a besoin d'être renouvelé. Écrémeuses et barattes modernes sont installées. Par contre, les moyens financiers de la coopérative étant insuffisante pour l'achat d'une machine frigorifique, la laiterie continue d'acquérir la glace dont elle à besoin à la fabrique de l'Association Centrale de Surgères.

1910 : Un atelier de fabrication de la caséine est construit pour permettre une meilleure valorisation du lait écrémé, qui avant était destiné à l'alimentation des porcs et le bétail des sociétaires .

L'entreprise reçoit environ 70.000 litres de lait par mois.

Depuis Avril, les sociétaires ne reçoivent plus qu'un dixième de petit lait, le restant est converti en caséine, dans l'atelier construit à cet effet au début de l'année. Le personnel de la laiterie comprend 3 ramasseurs payés chacun 2 francs par jour. A l'intérieur de l'usine il y a le comptable, le beurrier et un chauffeur.
 
                   
 

Le beurre se négocie à Paris, par mandataires, au prix de 2,85 fr le kg. Le litre de lait payé aux producteurs est de 0,115 frs, en moyenne.

La laiterie arrête la porcherie. L'emploi du petit lait à la caséinerie et les mauvaises odeurs, ont contribué à sa suppression.

Un jour, une mauvaise surprise attend le directeur. Il constate que le niveau d'eau, dans le puits, n'a pas monté depuis hier soir. On a dû tomber sur une petite poche. Le géologue se serait-il trompé?
M. Augereau (le rappelle au téléphone et lui décrit la situation. L'éminent technicien explique que la foreuse a probablement colmaté, sans le vouloir, l'arrivée de l'eau. Il suffit d'extraire le bouchon d'argile qui obstrue, à l'aide d'une pompe aspirante. Effectivement après cette opération, l'eau surgit et remplit le puits. Les analyses du laboratoire confirment la pureté de la source. M. Augereau et M. Edmond Morisset, le président, sont enfin rassurés.

1913 : La collecte annuelle se monte à 872.466 litres. La production de beurre a atteint un poids de 42.274 kilos.
Le président M. Grizeau est réélu.

1917 : Le matériel utilisé de laiterie est en mauvais état du fait qu'il existe depuis la création de cet établissement en 1890. A la fabrication du beurre est venue se joindre celle du fromage, puis la préparation de lait pasteurisé.

1922 : Invoquant son âge, M. Grizeau ne se représente pas à la présidence. Les administrateurs élisent M. Servant pour lui succéder.
La laiterie coopérative du Bourdet obtient diverses médailles pour son beurre extra fin, à Paris en 1900, 1910 et 1932, Milan en 1911, Strasbourg en 1923.


Camembert "Le Fameux".
 
                   
  1927 : Lors du Concours Agricole de Paris, la coopérative est récompensée par une médaille de bronze pour son beurre.

1929 : La production est de 4.000 litres de lait par jour l'été, et de 2.000 litres l'hiver. On y fabrique seulement du beurre et de la caséine lactique.
 
                   
 
Camembert "Le Délicieux".
1930 : M. Malisset est le nouveau président.

1932 : Une médaille d'argent, à Faris, récompense les efforts de la laiterie.
 
           
 
1934
 
           
  1943 : M. André Augereau arrive à la direction de l'entreprise. Il lance aussitôt l'atelier de fromagerie. Malheureusement pendant cette sombre période, la laiterie ne peut fabriquer que des fromages à 20% et même 0% de matières grasses, les allemands récupérant la crème pour eux.

1945 : La coopérative augmente son nombre de sociétaires. La laiterie de Prin-Deyrançon, dans l'impossibilité de payer ses producteurs, demande de l’aide au Bourdet. Les deux présidents se mettent d'accord, en trois jours. La laiterie coopérative éponge les dettes de sa voisine et absorbe les sociétaires de Prin-Deyrançon.

1949 : Au mois de Mars, le directeur M. Augereau quitte la laiterie. M. Louis Ovid, l'ancien dirigeant de la laiterie de Prin-Deyrançon lui succède.
 
                   

Fromage "Le Roi des Maigres",
étiquette emblématique et symbolique de la période 1939-45.



Pub de 1951
           
  1952 : La laiterie a collecté pour cette année 1,6 millions de litres. Elle produit du lait de consommation pour la ville de Niort.

Un nouveau quai de réception est créé, ainsi qu'un laboratoire d'analyses, puis la construction du garage et d'un transformateur électrique. Le matériel à été modifié quant aux écrémeuses et à la baratte elles sont d'un modèle nouveau. Les fabrications se poursuivront encore une dizaines d'années.

Afin de respecter la législation en vigueur, concernant la livraison obligatoire en bouteilles de lait dans les villes de plus de 20. 000 habitants, la laiterie contracte un emprunt de 5 millions de francs, auprès de la Caisse Nationale de Crédit Agricole (la CNCA). Une superbe chaîne d'embouteillage est installée. 
 
                   
  1954 : Un deuxième emprunt de 6 millions de francs est accepté par le même organisme bancaire.
Cette année là, la laiterie se tourne résolument vers le slaits de consommation, et est devenue le principal fournisseur de la ville de Niort en lait pasteurisé certifié.

Une propagande très suivie a conduit tout naturellement au paiement à la qualité en surveillant particulièrement :
        - l'alimentation rationnelle des vaches laitières
        - la propreté et la conservation des laits à l'étable
        - la collecte deux fois par jour en été
        - un contrôle et examen bactériologique des laits de chaque producteur

Cela assure en toute saison un produit ne dépassant jamais 18 à 20° Dornic et parfaitement propre à la pasteurisation.

Sous l'active et féconde direction de M. Ovide, des recherches très poussées sur la conservation des laits pasteurisés l'a conduit à utiliser le pasteurisateur-stérilisateur Laguilhar véritable révolution dans la pasteurisation.

L'appareillage est complété par une chaîne d'embouteillage Remy et deux compresseurs de 25.000 frigories chacun assurant le froid si nécessaire dès que l'on borde les laits de consommation.


La vendeuse de fromages, de profil.
                   

Carré de l'Ouest "Le Messager".

1955 : On s'aperçoit dans le passif du bilan de la laiterie, que le premier prêt figure toujours. La coopérative est dans l'impossibilité de couvrir l'amortissement. Son compte d'exploitation est en déficit. La Caisse Nationale a agi avec légèreté, en accordant ce deuxième crédit, sans bien vérifier où en était le précédent. 

1956 : "Vieille par sa date, toujours jeune par ses réalisations !" telle est la devise de la laiterie coopérative du Bourdet dont le souci majeur reste de donner toujours satisfaction à sa nombreuse clientèle.

La quantité de lait ramassé pour l'année se monte à 1,44 millions de litres. Le Bourdet est considérée comme une coopérative à faible volume de lait, en comparaison à ses voisines (Coulon : 5 millions, Mauzé-sur-le-Mignon : 3 millions).

La coopérative, présidée par M. Bonneau, déjà durement éprouvée, subit une nouvelle crise grave due à la pénurie d'essence imposée par le gouvernement, suite à la fermeture du canal de Suez et à sa nationalisation, par le président égyptien, le colonel Nasser.

Le rationnement décrété par l'État, touche tous les français et principalement les industries. La laiterie n'a droit qu'à 40 litres de carburant par camion et pour un mois. ll est difficile, dans ces conditions, d'effectuer la collecte entièrement et journellement.

De nombreuses petites laiteries se retrouvent au bord de la fermeture. Le Bourdet en fait partie.


Petit camembert "Le Bourdet".
                   
 

L'Association Centrale des Laiteries Coopératives du Poitou-Charentes, favorable aux fusions des exploitations laitières de peu d'envergure, convoquent, en Assemblée Générale Extraordinaire, les sociétaires du Bourdet et d'Épannes, en vue de la fusion de ces deux coopératives avec celle, plus importante, de Coulon.

Contrairement à ceux d'Épannes et contre toute attente, les producteurs du Bourdet refusent le regroupement avec leurs homologues coulonnais.

C'est un risque énorme, qu'ont pris les adhérents. On entendra même dire que la poursuite, en solitaire, de l'aventure de la laiterie, est périlleuse et suicidaire. Mais il faut respecter la voie démocratiquement choisie par les sociétaires. Et comme dit le proverbe : "Qui vivra, verra !".

 
                   
 
Fromage mi-chèvre du Bourdet.

Fromage de chèvre du Bourdet.
 
                   
  Le 21 Janvier 1960, comme chaque matin, un camion de la laiterie chargé de bouteilles de lait assure la distribution dans les dépôts de quartiers, de la ville de Niort. Comme à l'accoutumée, le chauffeur M. Emile Vandé, avec à ses côtés M. Gaston Gravat, font tous deux la tournée. Dans chaque quartier, les dépositaires règlent les laitiers en espèces. Comme d'habitude, M. Vandé range les billets de banque, dans une sacoche qu'il dépose sous son siège. La matinée se passe normalement, jusqu'à la rue Gambetta. Là, au dépôt du "Bon Accueil'', en ressortant, les deux hommes constatent, avec effroi, la disparition du sac en cuir, contenant la recette estimée à un million de francs.

La police ouvre une enquête. Le ou les malfaiteurs devaient être très au courant des habitudes de règlement des dépositaires. En effet, ces derniers ne payent que tous les quinze jours. De plus, par sécurité, M. Vandé dissimule la sacoche dans une boîte en métal, elle-même à l'abri des regards, sous la banquette du conducteur. Les recherches pour retrouver le ou les coupables du vol restent vaines. Un comité de la laiterie alla jusqu'à consulter une célèbre voyante, mais hélas sans succès. On ne retrouvera jamais les auteurs du vol.

Les nouveaux administrateurs élisent M. Marcel Sarraud à la présidence de la laiterie. M. Robin, le directeur, s'inquiète de l'avenir de l'entreprise.

 
1963 : La situation financière de la laiterie est catastrophique. Elle ne peut plus payer les sociétaires. Au mois de mai, la laiterie coopérative voisine de Coulon ramasse le lait du secteur. Les ouvriers vont travailler à Coulon. La laiterie du Bourdet cesse toute activité et fusionne avec la laiterie coopérative de Coulon. Le lait de ses sociétaires est ramassé et récolté par cette usine du Marais située à une quinzaine de kms. Les bâtiments de Le Bourdet sont alors désaffectés, puis vendus peu après à un particulier, qui va par la suite les restaurer et les transformer en logements.

1964 : Le 22 Juin, le dernier conseil d'administration, présidé par M. Sarraud avec les vice-présidents, MM. René Guinot et Henri Denoue, signent l'accord de fusion avec la laiterie de Coulon.

Les bâtiments sont vendus à un particulier, qui les transforme en logement.

 
                   
                   
            Rédaction ED - letyrosemiophile.com
                   
                   

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